Muriel Valat-b
Fil rouge
Certains artistes travaillent « en musique » ; je travaille « en poésie ». Mon travail plastique chemine en compagnie de la poésie. Un mot, une phrase, une association de mots imprévisible, une atmosphère, inspirent un trait, une tache, une texture, une nouvelle combinaison de couleurs, des fragments d’images, suscitent un geste, une action, encouragent un assemblage de matériaux, la découverte d’un nouvel outil.
La poésie m’offre ses audaces, m’invite ailleurs et pourtant me rassemble là où je suis, nourrit « ma vie profonde », me surprend, m’émeut, éveille ma perception, met mon esprit en vacance, ouvert aux surprises qui s’invitent sur la toile, sur le cuivre, sur le bois.
En retour, une tache de couleur, un trait d’eau-forte, une ébauche va partir à la recherche d’un mot, d’une phrase, d’une image dans un poème. Une rencontre, un dialogue, qui m’aident à faire apparaître ce que je ne vois pas.
En cette double compagnie, « Proches de plus en plus me deviennent les choses et les images, toujours plus vues » (Progrès de R.M. Rilke dans le « Livre d’images »)
Depuis deux années, le recueil de poèmes Ajoie de jean-Claude Pirotte a trouvé sa place dans l’atelier.
Conversation quotidienne.
Saint Fromond parle,
« il y a dit l’ermite une façon de dire
ici ou là ce que je dis importe peu
la prière n’est qu’un murmure de ruisseau
écoute aussi le psaume du vent dans les saules »
parfois je l’écoute,
« Fromond se penche le silence
est venu comme par magie »
© Éditions de La Table Ronde, 2012